Work
26 galleries
Le travail, sous toutes ses facettes – qu’il soit indigne, aliéné, inintéressant, voué à sa suppression ou au contraire rédempteur – se situe au cœur même de la recherche d’Olivia Gay.
L’artiste explore une société fracturée entre ceux qui n’ont aucun travail, voués non seulement à l’exclusion professionnelle mais aussi à l’exclusion sociale et à la perte d’identité, et ceux qui en ont trop, aliénés par des injonctions impossibles à satisfaire, menacés par le burn-out – toujours pas reconnu comme maladie professionnelle –, et dans leur identité psychique.
Et toujours, dans toutes les séries, le temps dédié à la parole, à l’échange, à la rencontre. Écouter, mais aussi relier, rassembler. Comme au Palais de la Femme, où Olivia Gay écoute les doléances d’une jeune Ivoirienne qui, contrairement à la chaude solidarité qui règne en Afrique, déplorait amèrement le « Chacun est dans son chacun » propre à la vie sociale en France. Comme aussi avec les ouvrières de l’Aigle, quand la photographe ne manquait jamais le rituel du café pris ensemble, le matin.
Politique, in fine, le travail d’Olivia Gay ? Peut-être, mais sans activisme ni militantisme. Raconter le monde des « petits », des laissé(e)s-pour-compte du capitalisme libéral avancé.
Il est à cet égard significatif qu’aucune image ne montre une femme à terre…
Mais, plus fortement encore, un travail « spirituel » – et non pas religieux.
Mais pourquoi ces femmes, toutes ces femmes, rien que des femmes ? Il serait périlleux d’indexer la recherche d’Olivia Gay sur un féminisme dont elle ne se revendique jamais.
À distance du féminisme très théorique d’une Simone de Beauvoir, l’artiste préfère se référer au philosophe Emmanuel Levinas, et évoquer les notions de « discrétion » et de « recueillement » : « Le recueillement indique une suspension des réactions immédiates que sollicite le monde, en vue d’une plus grande attention à soi-même, à ses possibilités, et à la situation. » Et, plus loin : « Le recueillement se réfère à un accueil. »
Le travail d’Olivia Gay est d’abord et toujours le signe de son engagement vers l’autre, de son « envisagement », pour reprendre, de mon côté, le sens que Levinas a pu donner à ce beau terme.
« Envisager », donc, toutes ces femmes – prostituées, dentellières, ouvrières, caissières, modèles, citadines, moniales, détenues, réfugiées… – comme une communauté de femmes qui résistent, en dépit de tout. Résistantes : ainsi vont les femmes d’Olivia Gay.
Dominique Baqué
L’artiste explore une société fracturée entre ceux qui n’ont aucun travail, voués non seulement à l’exclusion professionnelle mais aussi à l’exclusion sociale et à la perte d’identité, et ceux qui en ont trop, aliénés par des injonctions impossibles à satisfaire, menacés par le burn-out – toujours pas reconnu comme maladie professionnelle –, et dans leur identité psychique.
Et toujours, dans toutes les séries, le temps dédié à la parole, à l’échange, à la rencontre. Écouter, mais aussi relier, rassembler. Comme au Palais de la Femme, où Olivia Gay écoute les doléances d’une jeune Ivoirienne qui, contrairement à la chaude solidarité qui règne en Afrique, déplorait amèrement le « Chacun est dans son chacun » propre à la vie sociale en France. Comme aussi avec les ouvrières de l’Aigle, quand la photographe ne manquait jamais le rituel du café pris ensemble, le matin.
Politique, in fine, le travail d’Olivia Gay ? Peut-être, mais sans activisme ni militantisme. Raconter le monde des « petits », des laissé(e)s-pour-compte du capitalisme libéral avancé.
Il est à cet égard significatif qu’aucune image ne montre une femme à terre…
Mais, plus fortement encore, un travail « spirituel » – et non pas religieux.
Mais pourquoi ces femmes, toutes ces femmes, rien que des femmes ? Il serait périlleux d’indexer la recherche d’Olivia Gay sur un féminisme dont elle ne se revendique jamais.
À distance du féminisme très théorique d’une Simone de Beauvoir, l’artiste préfère se référer au philosophe Emmanuel Levinas, et évoquer les notions de « discrétion » et de « recueillement » : « Le recueillement indique une suspension des réactions immédiates que sollicite le monde, en vue d’une plus grande attention à soi-même, à ses possibilités, et à la situation. » Et, plus loin : « Le recueillement se réfère à un accueil. »
Le travail d’Olivia Gay est d’abord et toujours le signe de son engagement vers l’autre, de son « envisagement », pour reprendre, de mon côté, le sens que Levinas a pu donner à ce beau terme.
« Envisager », donc, toutes ces femmes – prostituées, dentellières, ouvrières, caissières, modèles, citadines, moniales, détenues, réfugiées… – comme une communauté de femmes qui résistent, en dépit de tout. Résistantes : ainsi vont les femmes d’Olivia Gay.
Dominique Baqué
Loading ()...
-
9 images
-
13 imagesInfirmières, aides-soignantes et auxiliaires de vie au travail La crise sanitaire et la médiatisation des inégalités ont favorisé une prise de conscience citoyenne qui a amené à ré-interroger le sens et la valeur du travail, ainsi que son utilité pour la société. De nombreux articles et reportages ont été consacrés aux « travailleurs essentiels » ou « travailleurs de l’ombre », qui ont continué à jouer un rôle indispensable pour le maintien de l’économie et de la société française : infirmièr.e.s à domicile, employé.e.s de la grande distribution, agent.e.s d’entretien, personnel soignant...autant de métiers dont l’utilité sociale était jusque là peu considérée. La série documentaire « A domicile » a été réalisée ans le cadre de la grande commande photographique BnF et Ministère de la Culture intitulée : «Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire ». Elle s’inscrit dans la continuité d’une recherche photographique initiée à la fin des années 90 et centrée sur l’invisibilité sociale et l’absence de représentation des femmes au travail. Pendant plusieurs semaines, j’ai suivi plusieurs équipes de femmes auxiliaires de vie (Picardie), aides-soignantes (Perche, Île de France) et infirmières (Tarn, Marseille) qui travaillent à domicile. J’ai cherché à photographier les gestes de soin comme les regards, pour donner à voir une image de ces métiers essentiels en ville comme dans des endroits isolés ou « zones fragiles » . En accompagnant ces soignantes lors de leurs tournées à domicile, j’ai pris conscience de la place essentielle qu’elles occupent dans la vie des personnes fragilisées par l’isolement, la maladie, ou la vieillesse. J’ai également voir que leur travail ne se limite pas à accomplir un soin technique mais consiste aussi et surtout à prendre soin de l’être humain dans sa globalité. Etre à l’écoute, transmettre un esprit positif, rendre un service, donner un conseil, prendre le temps d’un café, d’un gâteau…tous ces petits moments qui semblent anodins comptent. Le travail « à domicile » est un véritable choix. Car pour les soignantes, l’hôpital est devenu « une machine » dans laquelle on parle d’abord de « protocole ». Nathalie, aide à domicile, a préféré quitté son poste d’aide-soignante à l’EPHAD au risque de moins bien gagner sa vie, car elle ne trouvait plus « le temps de bien faire son travail ». Travailler à domicile lui permet « d’être véritablement présente avec le patient ».
-
23 images
-
29 images
-
57 imagesCes oeuvres (photographies, peintures, carnets) ont été réalisées dans le cadre d'ateliers de photographie menés entre 2013 et 2018 aux quartiers femmes des maisons d’arrêt de Rouen et de Caen. L’administration pénitentiaire partage avait alors imposé une consigne stricte : l’interdiction de révéler le visage des détenues en raison du « droit à l’oubli ». Malgré ces restrictions, l'atelier de soi est devenu au fil du temps un lieu de partage et de création collective sur l'image de soi et la place du regard en prison. Dans un coin de la salle d'activité, un studio en lumière naturelle est installé. Les portraits à visages démasqués sont ensuite peints par projection sur un mur au cours d'un autre atelier mené en collaboration avec le Musée des Beaux-Arts de Caen. Ils reçoivent de l’autorisation d’être exposés. Ces tableaux me seront ensuite offerts par les détenues qui souhaitent voir leur image exposée en dehors de la maison d’arrêt. Ce travail marque la fin du cycle « Envisagées » (1997-2018) et le point de départ d’une recherche doctorale RADIAN (2020-2023) sur l’image des femmes au travail par la pratique d’une photographie compréhensive. In 2013, I was invited to exhibit my photographs in the women’s quarters of a dilapidated red brick prison in the North of France. I put my personal questioning in context: how do you keep existing if nobody acknowledges or even sees you? How do you build self-esteem trapped in the final confinement of a prison cell? The women had all received a postcard in the previous days inviting them to a photography workshop about self-representation. This was intended as a gift. I meant to give them a respite, a moment when they were not criminals or numbers. Each woman chose her pose, attire and make-up. They brought their occasional diaries and most wore their attitude like an outfit in itself. It seems that as uncomfortable as it may sometimes be, having an image identifying us is a right, one that is snatched away from you the minute you step in prison. We spent a great deal of time discussing their self-image, then their image in prison, in their communities and in society at large. I invited them to take pictures of themselves, to make photographs were for their own use and for that of their loved ones. They shared their stories, they were brutal and often unfair. Lives with no anchorage that can so easily and quickly be caught in crime. As we discussed these lives of violence and hardship there were plenty of inner prisons and absentee mothers. As Monica, a young woman who just arrived in the prison told me:” You can be trapped in your image in a thousand different ways.” But it was tangible that all of us there, in that dirty yellow room, were yearning for the very same freedom.
-
18 imagesInvitée en résidence au Mirail en 2010 par le Château d’eau à Toulouse, je suis allée à la rencontre de femmes de toutes conditions et de toutes origines qui se côtoient quotidiennement : mères de famille, étudiantes, employées d’établissements sociaux…Je les ai photographiées sur un fond uni, à l’écart de leur environnement familial, social ou professionnel. Ces images presque abstraites d’individualités laissent transparaître leurs expressions, tenues et attitudes, le portrait d’un quartier. Au final, j’ai joué de l’étymologie du nom du quartier pour donner un titre à cet ensemble. « Mirabilia », est un mot latin qui signifie merveilleux, admirable.
-
16 imagesDans le cadre d’un projet collectif « Et le travail ? », la photographe a rencontré des femmes résidentes à Malmaisons, centre d’hébergement social Emmaüs, situé à Paris, dans le treizième arrondissement. Rencontre collective d’abord, puis en solo. Mais : les couloirs sont vides, la conversation difficile à engager, aucune résidente ne souhaitant être photographiée dans ce lieu pauvre, sale et vétuste. Il fallut toute la patience d’Olivia Gay pour arriver à ses fins, et une idée : elle entre dans le salon où se trouve la télévision, et aperçoit un mur propre, face à la fenêtre. Une résidente accepte de poser, dans ce studio improvisé. Elle est finalement suivie par d’autres, par la directrice, la cuisinière et les travailleuses sociales. La rencontre a lieu. Enfin." Dominique Baqué, in Résistantes, 2017 " dans le cadre d’un projet collectif « Et le travail ? », la photographe a rencontré des femmes résidentes à Malmaisons, centre d’hébergement social Emmaüs, situé à Paris, dans le treizième arrondissement. Rencontre collective d’abord, puis en solo. Mais : les couloirs sont vides, la conversation difficile à engager, aucune résidente ne souhaitant être photographiée dans ce lieu pauvre, sale et vétuste. Il fallut toute la patience d’Olivia Gay pour arriver à ses fins, et une idée : elle entre dans le salon où se trouve la télévision, et aperçoit un mur propre, face à la fenêtre. Une résidente accepte de poser, dans ce studio improvisé. Elle est finalement suivie par d’autres, par la directrice, la cuisinière et les travailleuses sociales. La rencontre a lieu. Enfin. Dominique Baqué, in Résistantes, 2017
-
17 imagesDans les camps de Aïda (Bethléem) en 2015 et de Qadoura (Ramallah) en 2016, avec le collectif La Forge. Dans le camp de Aïda, j'ai séjourné chez Islam avec ses cinq enfants dont un fils très handicapé. Islam a créée une association pour venir en aide à d'autres familles concernée par la situation du handicap. A Quadoura, j'ai séjourné chez Hannan, mère de cinq filles dont elle s'occupe seule, ainsi que de sa belle-mère, Othmana. En partageant le quotidien avec ces femmes, elles m'ont confié leur archives personnelles, des photographies de famille, et des moments de leur vie ordinaire. https://www.laforge.org/le-livre-un-bord-de-monde/
-
32 imagesLe Palais de la femme est une résidence d’hébergement sociale située au cœur de Paris, rue de charonne. Il dispose d’environ 280 studios individuels destinés à accueillir des femmes bénéficiaires de minimas sociaux, au chômage ou en temps partiel. À ce dispositif s’ajoute un centre d’hébergement et de stabilisation (CHS) qui accueille environ cinquante femmes de toutes nationalités, mères seules ou célibataires, parfois anciennes SDF, victimes de violences ou souffrant de troubles psychiques. Les résidentes sont hébergées dans des chambres individuelles, dont un pan de mur est recouvert d’une peinture de couleur vive : bleu, orange, rouge, jaune. Ces chambres sont équipées d’un lit, d’un sanitaire et d’une douche, d’une table avec deux chaises et d’un placard de rangement. J’ai commencé à réaliser des portraits documentaires de femmes résidentes dans leur chambre individuelle au CHS du Palais de la femme en 2013. Puis, quelques années plus tard, j’y suis retournée dans l’intention de les rassembler autour d’un atelier de photographie. ENG Le Palais de la femme is a social housing residence located in the heart of Paris, rue de Charonne. It has about 280 individual studios designed to accommodate women who are beneficiaries of minimum social benefits, unemployed or part-time. In addition to this system, there is also a shelter and stabilization centre (CHS) which accommodates about fifty women of all nationalities, single or unmarried mothers, sometimes formerly homeless, victims of violence or suffering from mental disorders. Residents are housed in single rooms, one side of the wall of which is covered with a brightly coloured paint: blue, orange, red, yellow. These rooms are equipped with a bed, a toilet and a shower, a table with two chairs and a storage cupboard. I started making documentary portraits of women living in their single rooms at the CHS of the Women's Palace in 2013. Then, a few years later, I returned with the intention of gathering them around a photographic workshop.
-
37 images"Contemplacoes" est le fruit d'une résidence photographique menée à Rio de Janeiro en 2013, sur l'invitation de l'Alliance française de Rio de Janeiro. Journal de recherche Rio de Janeiro, 8 octobre 2012 Dans la lumière du petit matin, une femme à la peau noire et au corps frêle, vêtue d’une blouse de travail cintrée, aux couleurs pâles déteintes par le temps, les cheveux tirés en chignon, un âge sans doute proche de la soixantaine, s’arrête pour contempler la brume qui lentement se dissipe des immeubles de Leme, quartier de Copacabana. Je m’arrête à quelques mètres derrière elle pour l’observer, et la photographier dans sa contemplation.
-
27 imagesJ’ai commencé à photographier des soeurs cloîtrées en 2007 au monastère de Chalais, dans l’Isère.Puis j’ai poursuivi mes recherches pendant sept années dans d’autres lieux, auprès de moniales dominicaines (Saint Maximin, Dax, Beaufort) et orthodoxes (Solan). Dans ces lieux sacrés, je m’imprègne du temps monastique, régulier, divisé entre prière (ora) et travail (labora). J’observe le va-et-vient des corps obéissants, drapés de noir ou de blanc, la répétition des gestes, des mains levées, des paumes ouvertes et des signes de croix; j’écoute les voix, mélodieuses ou sourdes, et je capte les regards, tour à tour levés vers les cieux, lumineux, ou baissés vers la terre, obscure. Ce qui se donne à voir, là, c’est le visage d’une communauté de croyantes, et non plus celui de personnes. A mesure que s’enregistrent mes images, le souvenir des icônes et des peintures religieuses s’entremêle à la présence de ces femmes célestes et bien réelles. Et je continue de m’interroger : la photographie nous inscrit-elle dans l’éternité ?
-
25 images
-
20 images
-
16 imagesDans la continuité de mes recherches sur les gestes de travail en usine, je me suis intéressée aux ouvrières de la dentelle de Calais employées dans plusieurs maisons. Ces femmes ont toutes été formées à un métier spécifique : la wheeleuse remplit les bobines de fil; l''extirpeuse vide les bobines de fil après utilisation sur les métiers; la raccommodeuse écru répare les défauts repérés par la visiteuse; la visiteuse marque à la craie les défauts ou ouvrages survenus pendant la fabrication; l'échantillonneuse coupe et prépare les échantillons qui feront partie de la collection du fabricant. Mais, avec le déclin de l’économie dentellière, les entreprises demandent aux ouvrières d’être polyvalentes. En photographiant ces femmes dans leurs gestes de travail, je les ai écouté me raconter avec fierté leurs années d’apprentissage et leur joie de « bien faire » leur métier.
-
22 imagesL’Atelier national du point d’Alençon est une bulle hors du temps, de la société de consommation, préservée de toute course à la productivité, ou l’unité de temps est la décennie, où patience et persévérance tiennent lieu de valeurs phares. Une dentellière explique « Les premiers temps ont été très durs. Des heures sur une chaise, à apprendre à maîtriser mes gestes. Progressivement, mes mains, ma vue, se sont habituées. On entre dans un monde, on atteint un palier, puis un autre, tout doucement. Il m’a fallu douze ans pour les franchir toutes. » En photographiant ces femmes à l’ouvrage dans cet univers clos quasi religieux, je me suis attachée à révéler le geste d’un savoir-faire ancestral dont la transmission se fait uniquement oralement. Interroger le geste à la fois mécanique et artistique du photographe qui enregistre une image en une fraction de seconde alors qu’il faut à la dentellière plusieurs heures de travail pour réaliser 1 cm de dentelle. Une recherche sur le temps de travail et de création, solitaire et collectif. La dentelle à l’aiguille, appelée aussi « Reine des dentelles », le point d’Alençon est née en 1650, au même moment que le point de Venise, qui exerce alors un véritable monopole de la fabrication et de la vente des plus belles dentelles à l’aiguille. Afin de réduire les importations de dentelles, Colbert crée des manufactures royales à Arras, Aurillac, Loudun, Reims, Sedan et Alençon. L’atelier national du point d’Alençon est crée en 1976 pour préserver des procédés de dentelles traditionnels sur le point de disparaître.
-
18 imagesIlaria Marotta. (Moving Gallery, Italie, 2005). Qu’est-ce que t’a attiré dans le monde des caissières de supermarchés? Voir l’envers du décor, suivre leur quotidien, poser mon regard sur un univers qui m’est totalement inconnu, mais surtout chercher comment photographier des femmes hôtesses de caisses, en uniforme, dans des espaces réduits, dans un environnement austère, froid, en lumière artificielle et donc sans aucun attrait de séduction possible. Un univers que nous connaissons tous, mais dans lequel on ne fait jamais que passer. Ta recherche poursuit-elle plutôt un objectif documentaire ou l’examen en profondeur des sujets représentés ? Les sujets que je traite sont des sujets de société, que tout le monde connaît et a déjà vu représentés. C’est une vision très personnelle de notre société que je donne à voir. Mes photographies me permettent de toucher d’un peu plus près le monde si sauvage dans lequel nous évoluons, de m’arrêter, de vivre “l’instant présent” dont parle Gaston Bachelard dans L’intuition de l’instant.Je ne cherche pas à faire une photographie pour “rapporter” à l’autre des informations qui permettent d’analyser ou de faire un diagnostic sur l’état du monde moderne, et donc une photographie journalistique ou de reportage qui traite l’information, je cherche davantage à construire mon univers autour de la représentation de mes contemporaines dans ce monde moderne, mais avec plus de poésie. En réalité je ne veux rien m’interdire. Dans tes photos, les vedettes sont avant tout des individus, avec lesquels tu entres en contact, que tu connais et auxquels parfois tu t’attaches. C’est de là que naît ton désir d’attribuer un nom à tes photos ? Les prénoms permettent de familiariser le spectateur et le sujet. Cela pose aussi l’ambiguïté de savoir s’il s’agit en effet d’un travail documentaire (un prénom = une information) ou d’une oeuvre photographique n’ayant pas l’intention d’informer. D’ailleurs, certains prénoms ont été inventés. Dans la série de portraits des caissières, certaines femmes ne portent pas leurs badges, les voient-on différemment? Leur enlève-t-on quelque chose?
-
25 images
-
30 imagesPhotographies réalisées dans le cadre d'actions pédagogiques en lycée agricoles, professionnels, écoles d'art, microlycée ou collèges.
-
6 images
-
20 images
-
10 images
-
14 images19 décembre 1998. J’emménage chez Farah au 567 calle Luz, entre Villegas et Acosta, dans le quartier de la vieille Havane. Toute la famille m’attend. C’est la première fois qu’une «yuma » (étrangère) vient se poser dans leur quartier. L’appartement deux pièces a été nettoyé spécialement pour mon arrivée, le sol soigneusement balayé de ses mégots de Popular. Farah insite pour que je dorme dans sa chambre, à « l’étage », sorte de planche en bois posée au-dessus de la chambre de sa mère. Elle a même prévu des cintres pour accrocher mes vêtements. Des draps propres couvrent le matelas aux ressorts qui tentent de s’en extraire. Une petite peluche est posée sur l’oreiller. Le ventilateur souffle ce qu’il peut d’air compressé. Farah a allumé le poste de radio casette pour me faire écouter la chanson de Willy Chirino « Jineteras », prohibée à La Havane, mais que l’on peut trouver sur le marché noir. J’apprends. A me laver avec un seau et à garder un verre d’eau pour le soir (pour les dents), pendant que résonne dans toute la ville le discours de Fidel Castro ou les voix des héros de la Novela, ( le feuilleton télévisé brésilien qui fait rêver tous les habitants de la vieille Havane). Nous faisons les courses, avec la libreta. Ration de pain, d’huile. Ration de riz. Il faut frapper à plusieurs portes pour trouver des œufs , un vrai jeu de piste. « Allez voir chez Pepe, je crois qu’il en a eu hier », « demandez à José, c’est lui qui en a dégoté une caisse ».Des heures pour préparer à manger, trier les haricots, les cuire.
-
19 imagesRésidence menée au lycée agro-alimentaire et agricole d’Yvetot à l’invitation du Centre photographique Rouen Normandie, en janvier 2022. Associant temps d’ateliers de pratique artistique avec les élèves et temps de création personnelle, la résidence était l’occasion d’étendre les préoccupations sur la représentation du travail, au territoire du lycée. Plusieurs questions se sont posées : quel regard les jeunes du lycée portent-ils sur le travail agricole et agro-alimentaire aujourd’hui? Quelles images gardent-ils du travail de leur parents ou du temps « des anciens » ? Et comment se projettent-ils dans leur futur profession ? Les agents d'entretien. Nadège, Isabelle, Annie, Sonia, Chantal, Nathalie, Bénédicte, Florence, Alexia, Guylaine, Lucie, Béatrice et Laeticia sont agents d’entretien au lycée agricole et agro-alimentaire d’Yvetot. Leur travail consiste à entretenir les salles de classes, centre de documentation, laboratoires, hall agro-alimentaire, réfectoire, dortoirs, amphithéâtre, salles des professeurs et gymnase, avant l’arrivée des élèves; ainsi que la laverie (grande plonge et entretien des locaux) deux fois par jour. Elles sont dix-sept agents au total, des femmes uniquement, réparties en deux équipes: celles du ma- tin commencent à 6h15 et terminent à 15h05 ; celles du soir arrivent à 11h45 et repartent à 20h05, une semaine sur deux. Leur journée est ponctuée de deux temps de pause, une à 8h et une autre à 16h, en fonction de leur équipe. Chaque agent a un poste attitré: Nathalie est toujours à la désinfection, Sonia au gymnase, Lucie au dortoir, à l’infirmerie et en salle des profs, Nadia au labo et à la résidence, Isabelle au dortoir E,F et au labo, Nadège au bâtiment G...
-
20 images